Toute sa vie, elle l’avait vu. Ce tableau qui représentait une jolie femme. Un tableau ? Plutôt une photo ou même un agrandissement d’une prise de vue. Une jolie femme sous un grand chapeau noir dans une sorte de pelisse à grands carreaux noirs et blancs qui la recouvrait. Elle semblait avoir pris place sur une chaise à dossier noir. Et, aussi, de longs gants noirs qui se cachaient, en partie, sous les larges manches du manteau. Un beau collier de chien, sans aucun doute un collier de perles véritables. Mais, sur ce point, la photo pouvait mentir. Des sourcils très arqués, une bouche gourmande. Juliette aurait juré qu’elle avait maquillé cette bouche d’un rouge cerise éclatant. Mais, là aussi, la photo ne pouvait confirmer cette teinte car elle était en noir et blanc. Une femme qui avait de l’allure.
- C’est Lisa, avait dit Maman.
- Quelle Lisa ?
Maman ne savait pas. D’ailleurs, Lisa n’intéressait pas maman. Elle ne la regardait jamais. Mais Juliette la voyait tous les jours. Elle aurait voulu ressembler à cette Lisa qui paraissait se mouvoir avec facilité dans la vie.
Un jour, elle regarda mieux ce tableau. Et, elle vit, dans le coin droit, une sorte de signature. Man ou Men ou encore Mon. Et encore un Re ou Ra puis une sorte de tiret. Elle ne s’en inquiéta guère. Sans doute une signature mais qui ne l’intéressait pas outre mesure.
Elle devait avoir sept ou huit ans. Elle revint à la charge.
- Tu crois, maman, que c’était la maîtresse de papa ? Maman avait eu une sorte de hoquet.
- La maîtresse de papa ? Mais qui t’a raconté une chose pareille, chérie ? Mais non, mon ange. Tu sais bien que papa a épousé Cécile et qu’il n’a jamais été question d’une Lisa.
- Bien sûr, maman.
Juliette le savait fort bien. Mais, elle avait aussi entendu, un jour, tante Janine, la soeur de maman, déclarer avec aplomb :
- Fiche-nous la paix avec ton Daniel. Tu sais très bien qu’il te trompait déjà à la naissance de Juliette.
Maman ne répondait pas. Elle parlait d’ailleurs fort peu.
- Pourquoi es-tu tellement lymphatique ? avait dit tante Janine. Pourquoi, faut-il, que tu penses toujours à lui ?
Juliette, elle, le savait. Ce Daniel, c’était son père. Un père presque toujours absent, un homme qui avait refait sa vie avec la dénommée Cécile. Et papa avait une autre fille. A peine plus jeune que Juliette. C’était l’horrible Hermione.
- Treize mois de moins, avait dit maman.
Comment papa, un monsieur aussi distingué, avait-il pu appeler cette deuxième fille Hermione ? Juliette la détestait. C’était sans doute réciproque. Il est vrai qu’elles se voyaient si peu. Quand papa venait voir Juliette, il s’enfermait d’abord avec maman. Juliette ne savait pas de quoi ils pouvaient parler. Au fond, elle s’en moquait. Puis papa venait lui dire au revoir, lui donnait quelquefois un tout petit baiser sur la joue et repartait. Il venait si rarement. Il y avait là-bas, dans un autre quartier de la ville, Cécile et Hermione.
Pourtant, pour son anniversaire, papa lui apportait un cadeau. Un jour, elle devait avoir onze ou douze ans, papa n’était pas venu. Il avait téléphoné d’une autre ville pour s’excuser. Trop de travail; il ne pouvait rentrer dans la journée. Juliette n’avait rien dit. Maman avait réceptionné, pendant qu’elle était en classe, un coursier qui lui avait remis un tout petit colis. Son cadeau d’anniversaire. Un bracelet. En toc... Sans doute choisi par l’horrible Hermione. Maman avait haussé les épaules, Juliette avait balancé le bracelet au fond d’un tiroir. C’était cela ses relations avec son père. Elle n’était pas malheureuse, même pas triste. C’était ainsi. Sans doute, l’horrible Hermione avait-elle droit au lourd bracelet en or qu’elle admirait dans la vitrine de son joaillier préféré ou - faute d’argent - elle n’achetait jamais rien.
Et la vie s’écoulait. Sans heurts. Juliette savait que maman n’était pas riche, elle ne travaillait pas. Elle était toujours fatiguée. Il y avait des jours où aucun repas n’était préparé. Cela ne gênait pas Juliette. Elle se faisait une tartine, buvait un verre de lait, de jus de fruit ou, à défaut, remplissait un verre à l'eau du robinet.
Juliette n’avait pas de véritables amies. Comment amener une petite camarade à la maison ? Cela aurait tellement fatigué maman. Et maman ne semblait connaître personne dans cette grande ville.
De temps à autre, tante Janine et l’oncle Paul les invitaient. Tante Janine enseignait le français dans un collège - là où les jeunes sont encore normaux, affirmait-elle avec force, mais où le proviseur n’était pas à la hauteur - Car, tante Janine voulait enseigner le latin. Mais, voilà, le collège n’avait pas de classe de latin.
- Et, le collège voisin, avait demandé Juliette.
- Non plus, avait crié tante Janine. Pourquoi s’énervait-elle ainsi? On nous pourrit notre jeunesse.
Juliette - elle devait avoir douze ou treize ans à cette époque - ne comprenait pas pourquoi l’absence de l’enseignement en latin avait une quelconque influence sur le soi-disant pourrissement de la jeunesse.
- Ta fille n'est guère empathique, avait ajouté tante Janine mais, toi au moins, tu me comprends avait-elle déclaré en s'adressant à maman.
- Oui, avait répondu maman d’une voix douce, je te comprends, Janine.
Oncle Paul, une fois de plus, n’avait rien dit. D’ailleurs, il était comme Juliette et maman, il ne parlait pas beaucoup. Lui, enseignait la géographie. Juliette ne comprenait pas comment on pouvait se passionner pour une science aussi compliquée. Elle confondait régulièrement l’Orne et l’Oise, ne savait jamais où la Loire prenait sa source et avouait son impuissance à situer Madrid sur une carte.
- A ton âge, soupirait l’oncle Paul, je connaissais tous les départements par coeur et j’y ajoutais leur chef-lieu.
- Au secours, s’était écriée Juliette, ce qui lui valu un coup d’oeil furieux de tante Janine. Tu n’aurais pas voulu enseigner le dessin, oncle Paul ? avait dit un peu méchamment Juliette. Elle savait que l’oncle Paul qui avait un joli coup de crayon aurait voulu, sinon devenir peintre, du moins traquer le tableau à ses moments perdus. Mais voilà, il y avait la tante Janine... et des moments perdus, l’oncle Paul ne devait pas en avoir beaucoup.
Juliette soupira.
- Que la vie est compliquée, n’est-ce pas maman ? Mais maman ne répondit pas. Elle avait repris cet air rêveur et surtout ce regard absent qui faisait croire qu’elle se désintéressait de tout ce qui l’entourait : lymphatique avait dit tante Janine.
- Tu fais quoi en classe ? demanda brusquement la tante. Prise au dépourvu, Juliette ne sut que répondre. Au fond, elle ne faisait pas grand chose en classe. Elle glissait, elle ne savait pas elle-même comment cela se faisait, d’une classe au niveau supérieur. Avec maman, il n’y avait pas d’efforts à faire, elle ne demandait jamais rien. Les notes de Juliette l’indifféraient. D’ailleurs, Juliette ne lui en parlait jamais. Quand Juliette avait besoin de cahiers, de livres, elle demandait à maman qui lui donnait l’argent nécessaire. Et qui lui disait chaque fois :
- Ne perds pas les bons de caisse, j’en ai besoin.
Pourquoi en avait-elle besoin ? Pour les classer soigneusement, jour après jour, dans une sorte de classeur-accordéon. En outre, elle notait encore tout sur une feuille à part. Un travail que Juliette jugeait idiot mais que maman faisait très soigneusement.
Et puis, et puis, un jour Juliette eut seize ans... Cette année là papa vint lui-même apporter son cadeau. Juliette n’y comptait même plus. C’était un tout petit paquet.
- Ç a y est, un collier en toc, se dit Juliette. Au fond, cela lui importait peu. Mais papa avait fait une chose qu’il n’avait jamais faite auparavant. Il avait amené l’horrible Hermione.
- C’est moi qui ai choisi ton cadeau d’anniversaire, claironna celle-ci. Regardes, si elles ne sont pas belles.
Elles, c’était un pluriel. Belles, c’était à voir. Un peu étonnée, Juliette ouvrit le petit paquet. Une boîte dans un joli emballage bleu. De très belles boucles d’oreilles apparurent. Tout de suite Juliette sut qu’elle avait déjà vu des boucles identiques. Où donc ? Mais bien sûr, c’est Lisa qui les portait. Une grosse perle sertie dans un anneau doré. L’horrible Hermione interrompit ses pensées.
- De l’or véritable, lança-t-elle à l’adresse de Juliette. Sans doute avait-elle raison. Et Juliette dut même reconnaître que l’horrible Hermione avait du goût. Les boucles lui allaient à ravir. Aussi bien qu’à la jolie Lisa. Même papa daigna sourire. Il embrassa Juliette plus attentivement que les années précédentes puis s’excusa de devoir partir rapidement. Lui, Cécile et Hermione devaient participer à un cocktail auquel ils ne pouvaient se soustraire.
- Tu comprends, ma chérie, j’ai des obligations. Et l’horrible Hermione d’ajouter perfidement :
- Il a deux femmes à la maison et il faut que nous vivions tous sur son salaire. Sans compter les deux mille cinq cents francs qu’il est obligé de verser à ta mère pour ton éducation. Alors, pour le cadeau tu peux nous remercier.
Par hasard, les yeux de Juliette se posèrent sur ceux de maman. Elle y lut une telle détresse, une telle prière qu’elle ne pu que dire d’une toute petite voix :
- Merci papa, merci Hermione, alors qu’elle aurait voulu lancer de toute la force de ses bras maigres les boucles au visage de l’horrible Hermione.
- Alors salut, claironna celle-ci.
Papa regardai Juliette. Vit-il les larmes qui lui picotaient les yeux ? Il se retourna très vite et sortit, entraînant l’horrible Hermione qui lançait, désinvolte, en direction de maman :
- Au revoir, Madame, peut-être à bientôt.
La vie continua. Maman était toujours plus pâle, plus éthérée. Elle ne se levait plus le matin lorsque Juliette allait en classe. Juliette s’y était habituée. Mais, un jour en rentrant à midi, elle trouva maman toujours au lit. Très pâle :
- J’ai très mal, soupira-t-elle.
Quelques jours plus tôt, tante Janine lui avait fait répéter plusieurs fois son numéro de téléphone. Juliette et maman n’avaient pas le téléphone. Pourquoi faire ? C’était une dépense inutile.
- S’il te plaît, appelle Janine... Maman avait un air implorant et on entendait presque pas sa voix. Cette fois, Juliette s’inquiéta. Elle appela tante Janine qui n’était pas à la maison. L’oncle Paul était là.
- J’arrive tout de suite, déclara-t-il. Juliette avait appelé de la poste qui était à une centaine de mètres de là. Elle ne pouvait pas utiliser de cabine ne possédant pas de carte. Oncle Paul accourut.
- Laisse moi seul un instant avec ta maman mon enfant, avait-il dit à Juliette. Elle passa dans la cuisine. Oncle Paul revint.
- Je vais téléphoner à Janine, déclara-t-il. Elle doit être rentrée. Janine était à la maison. Elle arriva accompagnée d’un médecin.
Et l’on emmena maman à la clinique. Juliette allait la voir tous les jours. Maman ne se plaignait jamais. Elle ne parlait presque plus. Ses yeux s’éteignaient. Elle serrait toujours très fort la main de Juliette quand celle-ci venait. Et une après-midi, alors que Juliette, une fois ses cours terminés, se rendait à la clinique, elle vit devant la chambre de maman oncle Paul et tante Janine. Elle avait compris. Maman n’était plus. Pauvre maman. Elle n’avait même pas pu serrer une dernière fois la main de sa Juliette chérie. Tante Janine pleurait. Oncle Paul avait, lui aussi des larmes aux yeux. Juliette ne comprenait pas cela. Un homme, ça ne pleure pas, se dit-elle. Puis elle eut des remords. Elle n’aurait pas du avoir de telles pensées en ce moment.
Et maintenant, tout était terminé. Maman reposait dans ce cimetière de la petite ville où elle avait vu le jour. Non, ce n'était pas si loin.
- Tu pourras t'y rendre quand tu voudras, avait dit tante Janine. Mais Juliette ne voulait pas s'y rendre.
- Repose en paix, avait-elle songé en lançant une rose blanche dans la tombe.
- Qu'allons nous faire, avait soupiré tante Janine entraînant Juliette et l'oncle Paul, une fois la cérémonie au cimetière terminée.
Pour le moment, on ne fit rien si ce n'est avaler du café, du chocolat, de la bière. Car Juliette constata avec stupéfaction qu'oncle Paul était un adepte de canettes.
L'année scolaire se terminait dans quelques semaines, Juliette habitait chez l'oncle Paul et la tante Janine. Tante Janine se penchait davantage sur les devoirs de Juliette que maman, et constatait avec dépit que Juliette avait de graves lacunes. Il y avait aussi ce jour où l'oncle Paul avait dit:
- Ma chérie, il faudra s'occuper de ta vie future, de la fortune de ta maman, de la somme que te verse ton père, bref, de tous ces détails qui font partie aujourd'hui de l'organisation d'une existence. L'organisation d'une existence! Quels vilains mots. Oncle Paul et tante Janine voulaient qu'elle se rende avec eux chez le notaire de famille, Maître Lorang, qui allait s'occuper de tous ces détails. Juliette signa tout ce que l'on voulait. Elle n'avait nulle envie de lire tous ces papiers ennuyeux. On organisait son existence comme on voulait. Maman qui tenait une si petite place dans son entourage lui manquait tout de même beaucoup.
- Tu passes dans la classe supérieure ? avait demandé un matin tante Janine. Elle passait. Tante Janine soupira une fois de plus. Et puis, tout le monde partit en vacances. Juliette qui ne voyageait jamais avec maman se retrouva un jour au bord de la mer.
- Nous allons en Bretagne avait décrété tante Janine.
Oncle Paul semblait ravi. Juliette découvrit avec un peu d'étonnement que tante Janine et oncle Paul possédaient une très jolie maison non loin de l'océan. En fait, elle comprit plus tard, que la maison faisait partie du patrimoine de l'oncle Paul. Avec Juliette, il visita d'autres villas qui lui appartenaient aussi. Bref, oncle Paul semblait un homme aisé.
- Un héritage de mes parents. Papa était dans l'immobilier. C'est d'ailleurs au cours d'une tournée que mon père et moi-même avons fait la connaissance de ton père. Et Juliette apprit - enfin - que papa lui aussi s'occupait d'immobilier. Elle ne sut pourquoi, mais cela lui semblait un métier nettement moins honorable que professeur de géographie.
C'était beau l'océan, c'était grand. C'était ce qu'il fallait à Juliette. Un jour, au dîner, tante Juliette demanda:
- Qu'allons nous faire à la rentrée? J'aimerais que tu passes ton bac, ma chérie. N'est-ce pas ton avis?
Juliette voulait bien. Elle l'on reparla de l'organisation d'une vie future. Oncle Paul et tante Janine travaillaient tous deux. Ils ne pourraient donc s'occuper éternellement de Juliette. Tante Janine prit un élan:
- Chérie, et que dirais-tu si tu allais vivre parmi des jeunes de ton âge? Pour une fois, Juliette comprit vite. Non point que l'oncle Paul et la tante Janine aient voulu se débarrasser d'elle. Elle les connaissait maintenant suffisamment pour savoir qu'ils voulaient l'aider, à organiser correctement son existence.
Avec un peu de stupeur, elle s'entendit répondre:
- Pourquoi pas? Mais ai-je suffisamment d'argent pour payer la pension où vous voulez m'envoyer?
Oncle Paul qui semblait approuver la bonne volonté de sa nièce répliqua qu'il n'y avait aucun problème. Papa avait bien voulu ajouter encore cinq cents francs aux deux mille cinq cents qu'il lui versait pour son éducation comme l'avait souligné l'horrible Hermione .
- Et notre logement? celui qu'elle avait partagé avec maman.
- Tu le gardes, il est maintenant à toi, avait ajouté vivement tante Janine. Oncle Paul avait acquiescé.
- Maître Lorang s'est occupé de tout. Permets-nous de tout mettre en route pour ta rentrée en pensionnat.
Juliette avait dit oui. Au fond, elle se réjouissait même de mener une nouvelle vie. L'organisation de sa future existence était en bonne voie.
On rentra. Papa téléphona.
- Viens nous voir, ma chérie. Cécile et Hermione seront heureuses de bavarder avec toi. Cela l'étonnait. Mais elle avait acquis assez de courage pour affronter maintenant l'horrible Hermione. Cécile posait moins de problème. Elle avait toujours ignoré Juliette et Juliette l'avait rangée dans le cadre des gens "neutres". Ce fut une soirée sans histoire. Juliette raconta qu'elle allait entrer au pensionnat. L'horrible Hermione ne fit pas de commentaire. Papa semblait soucieux, Cécile indifférente.
La vie continua. Paisible. Oncle Paul et tante Janine s'occupaient beaucoup d'elle. Aux grandes vacances, aux petites vacances, on allait dans la jolie maison de Bretagne. Juliette avait avoué à l'oncle Paul qu'elle adorait cette maison. Elle travaillait bien en classe. Car, brusquement, sans doute sous l'influence de l'oncle Paul et de la tante Janine, elle se découvrit un penchant pour les études. Elle ne confondait plus l'Orne et l'Oise, savait placer Madrid sur une carte. Certes, la géographie ne la passionnait toujours pas, mais l'histoire l'attirait. Elle se mis sérieusement au travail. Elle n'avait pas autre chose à faire dans ce pensionnat qu'étudier. Autant le faire avec ardeur. Papa ne l'invitait plus. Mais quelquefois il venait lui rendre une trop courte petite visite au pensionnat.
Les bonnes notes de Juliette semblaient lui faire plaisir. Il prit l'habitude non pas de lui faire un cadeau, mais de lui remettre un billet. Pas de gros billet, mais une petite somme tantôt cinquante francs, tantôt cent francs, billet toujours bien accueilli par Juliette qui payait ainsi ses petites fantaisies. Elle s'était découverte une envie constante de tablettes de chocolat aux noisettes. Longue et fine, ses orgies soudaines n'avait pas de conséquence sur sa ligne. Ses petites gourmandises, elle n'en parla à personne. C'était son secret entre papa et elle.
Elle découvrit aussi qu'oncle Paul avait non seulement un joli coup de crayon mais qu'il avait enseigné et qu'il enseignait aussi l'histoire avec sa sempiternelle géographie. Il avait chez lui une bibliothèque bien fournie en livres d'histoire. Aux vacances, elle remplissait toute une valise se permettant de les lire non pas sur la plage, (l'huile solaire laissait de vilaines taches sur les jolis bouquins) mais dans sa chambre confortable et si gaie.
- Et si tu faisais des études d'histoire après ton bac, avait suggéré l'oncle Paul.
- Pourquoi pas? C'était même une bonne idée. L'organisation de son existence était en bonne voie. Elle quitta donc le pensionnat et s'installa de nouveau dans le petit appartement qu'elle avait partagé avec maman. Tout était propre, tout était net, tout était parfaitement rangé. Elle retourna chez Maître Lorang. Il fallait encore signer des papiers. Elle découvrit avec surprise - mais où avait-elle eu ses yeux - que tante Janine et oncle Paul payaient tout. Les impôts, les charges, le chauffage, la femme de ménage, les vêtements qu'elle portait. Avec angoisse, elle se rendit compte qu'elle avait vécu toutes ces dernières années à leurs crochets. Alors maman?
- Elle n'avait aucune fortune personnelle, ma chère enfant, lui apprit Maître Lorang. Mais ne me regardez pas avec ces yeux. Votre oncle et votre tante étaient trop heureux de subvenir à vos besoins.
Maître Lorang lui souriait avec bonté. Il lui présenta un jeune homme qui semblait un peu timide, un peu boutonneux mais qui avait, lui aussi, de beaux yeux fidèles.
- Mon fils, Antoine. Il prendra ma succession. Il vient de terminer ses études. J'ai envie de lui confier votre dossier. Qu'en pensez-vous ma chère enfant?
La chère enfant n'avait pas d'opinion bien définie. Antoine la regardait avec un peu d'angoisse dans les yeux. Elle lui sourit gentiment.
- Bien sûr Maître, j'en serais ravie.
Antoine la raccompagna jusque sur le palier. Il semblait content. Juliette se précipita pour voir l'oncle Paul et la tante Janine. Ce fut une scène un peu pénible. Elle se reprochait - et se le reprochera toujours - de n'avoir rien deviné, rien vu.
Oncle Paul tenta de la consoler.
- Nous n'avons pas pu avoir d'enfant. Mais nous avons été heureux d'avoir pu faire cela pour toi.
Et d'ajouter fermement :
- Et nous continuerons à le faire car nous pensons que tu réussiras très bien à l'université. Tes succès seront un peu les nôtres.
C'était aussi simple que cela. Juliette se fit inscrire à l'université et revit papa. Et aussi Cécile ainsi que l'horrible Hermione. Car papa, un jour, l'avait de nouveau invitée. Cécile était toujours aussi neutre. L'horrible Hermione ne tenait pas en place.
- J'attends Benjib. Comment se fait-il que tu n'aies toujours pas de petit ami? Avec tes yeux - ils sont du même gris que ceux de papa - tu ne feras jamais rien. Papa a des yeux vifs. Les tiens semblent éteints. Tu regardes à travers les gens.
Le Benjib en question arrivait. En vérité, il se nommait Martin. L'horrible Hermione s'accrocha triomphalement à son bras. Benjib salua très gentiment Juliette et la gratifia d'un regard admiratif. L'horrible Hermione l'entraîna très vite.
Juliette dîna avec papa et Cécile. Cette dernière ne disait presque rien. Papa parlait de crise et d'affaires qui n'allaient plus très bien. Mais il ne revint pas sur les trois mille francs qu'il lui versait tous les mois.
Les années passèrent. Juliette vit très peu l'horrible Hermione. Elle apprit seulement que Benjib avait rompu. Elle retourna de temps en temps chez Maître Lorang, toujours pour signer des papiers. C'est Antoine qui la recevait dans son bureau. Mais il était flanqué d'une assistante ou d'une secrétaire, toujours la même, qui jetait de méchants regards à Juliette. Antoine ne la raccompagnait plus jusque sur le palier. C'était la secrétaire qui se chargeait de cette besogne. Dommage...Elle passa brillamment des examens et effectuait déjà des remplacements dans un collège pour gagner un peu d'argent. Elle fit installer le téléphone. Oncle Paul avait pris sa retraite mais sa belle santé s'était envolée. Tante Janine soupirait :
- Le pauvre, il est bien malade. Elle ne voulait pas inquiéter Juliette.
- Appelles quand tu voudras à n'importe quelle heure du jour ou de la nuit, avait dit celle-ci.
On n'allait plus en Bretagne. La maison manquait beaucoup à Juliette. Mais, pendant les vacances, elle ne voulait pas laisser tante Janine seule avec oncle Paul si malade.
Un matin, quelqu'un l'appela. D'abord, elle ne sut qui cela pouvait être. On pleurait beaucoup à l'autre bout du fil. C'était Cécile. Et Juliette apprit que papa était mort dans la nuit. Une crise cardiaque. Pourquoi papa? Elle l'avait vu deux jours auparavant. Il lui avait semblé en pleine forme. Papa avait bien bu le whisky qu'elle lui servait toujours quand il venait, elle buvait un soda. Il s'était plaint non pas de sa santé mais des affaires qui allaient de plus en plus mal.
Bien sûr, elle alla à l'enterrement de papa.
Et puis, deux jours plus tard, ce fut l'horreur. Tout bascula le jour où trois policiers s'introduisirent chez elle. Lui posant mille et une questions. Qu'avait-elle fait les huit derniers jours? Quand avait-elle vu papa pour la dernière fois? Lui avait-elle servi une boisson? Quel était le poison qu'elle lui avait versé? Comment ne savait-elle plus où elle était le vendredi de la semaine passée? Etait-il possible qu'elle eût si peu de mémoire? On pouvait suivre sa soeur heure par heure tandis que, dans son emploi du temps à elle, il n'y avait que des blancs. Juliette finit par hurler. Une vraie crise de nerfs. Les policiers téléphonèrent. Un médecin arriva. Tante Janine eut "le droit" de voir sa nièce. Elle aussi se mit à crier. Les policiers crièrent plus fort. Très joli tout cela.
Finalement Maître Lorang - tante Juliette avait sûrement eut le temps de le prévenir - arriva. Avec Antoine sur ses talons. Il était très calme. Antoine aussi. Celui-ci serra très fort la main de Juliette.
- Nous sommes là, ma chère enfant, dit Maître Lorang. Qu'est - il arrivé?
On s'expliqua. Du moins les policiers parlèrent à Maître Lorang, une fois que celui-ci eût décliné son identité .Antoine avait disparu. Il revint très vite avec un de ses amis, Maître Soulias. Un avocat
- C'est lui qui va vous assister, ma chère enfant, déclara Maître Lorang.
Juliette eut le droit de s'étendre sur le canapé. On lui apporta un grand verre d'eau fraîche. Et tout s'expliqua. Enfin, certaines choses s'expliquèrent.
Papa avait fait un testament plus que bizarre. Il avait voulu que sa fortune - du moins ce qui en restait , expliqua Antoine - soit partagée entre son épouse Cécile, et "celle qui se révélerait être sa vraie fille".
L'horrible Hermione avait crié sur tous les toits que Juliette avait tué papa et que la "vraie fille", c'était elle. Il y eut enquête. La police ne pouvait que s'en mêler. Une crise cardiaque ? Bizarre. Certes, papa avait déjà fait un infarctus il y a un an. Empêtrée dans ses examens, Juliette n'avait rien su. Papa n'en avait jamais parlé. Bizarre, avaient conclu les policiers. Etait-ce vraiment une crise cardiaque? On avait déterré papa sans demander l'avis de Juliette. Il parait que tout cela n'était pas très légal, mais c'était fait .Il n'y avait pas eu de crise cardiaque, avait conclu l'autopsie. C'était bel et bien un empoisonnement.
- Quel poison? demanda Juliette. Personne ne daigna lui répondre. Maître Soulias prit l'affaire en main. Il fallait se rendre au commissariat.
- Ne craignez rien, ma chère enfant, nous allons nous occuper de vous.
- Maître Soulias restera à vos côté, déclara Maître Lorang. Antoine lui donna même un petit bisou sur la joue.
- T'inquiètes - pas ma chérie - il l'avait appelé ma chérie - Soulias va démêler cet écheveau.
Il y eut des interrogatoires, des perquisitions. Cela dura très longtemps. Un jour, deux jours, une semaine... Plus tard Juliette reconnut qu'elle avait des vides, des oublis. Elle ne se souvenait que partiellement de cette affreuse période. Certes, on ne l'avait pas arrêtée. Les preuves manquaient, clamait Maître Soulias, mais elle n'avait pas le droit de quitter la ville. Pas le droit de voir tante Janine .Maître Soulias était chargé de la rassurer.
Et, un beau matin, tout était terminé. Maître Soulias revint dans le petit appartement avec Maître Lorang.
- C'est fini, ma chère enfant. Vous n'avez plus rien à craindre. Juliette avait envie de s'évanouir, de partir, de dormir... Mais Antoine arrivait. Il ne fallait pas se laisser aller. Et finalement la curiosité l'emporta. Elle voulait savoir. Tout de suite. Qu'était-il arrivé à papa?
Pauvre papa. Il avait effectivement été empoisonné. Non ce n'était pas l'horrible Hermione. C'était sa mère, Cécile. Pourquoi? A cause du testament de papa. Cécile et l'horrible Hermione en connaissaient la teneur. Hermione était sa fille, Juliette aussi. Mais si on pouvait faire croire que Juliette avait voulu porter atteinte à la vie de papa, cette moitié de fortune reviendrait sans problème à Hermione; ainsi les deux femmes auraient tout.
Juliette retrouva un semblant de sérénité. Mais le cauchemar la reprit. Un matin, il y avait de nouveau quelqu'un au bout du fil. Quelqu'un qui sanglotait. Tante Janine. Oncle Paul était décédé dans la nuit. Il s'était endormi tout doucement. Encore des larmes, encore des problèmes, encore mille et une questions à régler. Mais, cette fois, ni enquête, ni perquisition. Antoine était à ses côtés.
Une fois toutes les formalités accomplies et l'oncle Paul enterré, Juliette ferma son petit appartement et s'installa chez tante Janine. Plus jeune qu'oncle Paul, elle n'avait pas encore droit à sa retraite. Tant mieux. Le travail la reprit. Ses élèves, ses cours, les copies à corriger. Elle retrouva vite son équilibre, mais ne s'indigna plus sur le fait qu'il n'y eût toujours pas de classe de latin dans son collège.
Et Juliette rentra chez elle. Reprit sa vie d'étudiante et de remplaçante dans les collèges. Elle préparait le CAPES avec ardeur. D'ailleurs, Antoine l'encourageait. Ses études à lui avaient été longues et pénibles. A Juliette de faire, elle aussi, des efforts. Ce n'était pas pour lui déplaire.
Chez elle, Antoine buvait volontiers un scotch. Juliette était restée au soda. Comme du temps de papa. D'ailleurs, elle pensait souvent à lui, se reprochant de l'avoir si mal aimé ou plutôt de ne jamais avoir manifesté ses sentiments.
Antoine lui apportait des nouvelles de Cécile et d'Hermione.Il y avait eu un sacré coup de théâtre. Sans doute, bien conseillée par son avocat, Hermione avait déclaré, juré, qu'elle n'avait jamais été au courant des intentions de sa mère. D'ailleurs, ce père, elle l'adorait. C'était sa mère qui l'avait tué, pas elle.
Ayant eu connaissance des déclarations de sa fille qui tentait par tous les moyens de se disculper, Cécile entra dans une rage folle. Et devant le juge d'instruction - quelle bêtise - elle avait déclaré que tout cela était faux. Un jour, en entendant son mari se plaindre des affaires qui allaient de plus en plus mal et aussi à cause d'un certain manque d'argent à la maison, elle avait jeté à la figure de papa qu'Hermione n'était pas sa fille, le vrai père étant quelqu'un d'autre. Cela avait été confirmé par la suite. Alors ne pouvait-on pas perdre la tête, en voyant le testament de papa? Car, sans doute par un moyen peu avouable, Cécile et Hermione en avaient eu connaissance longtemps avant sa mort.
- Cela va nous poser de drôles de problèmes juridiques, avouait Antoine. Et d'y ajouter comme son père :
- Ne t'inquiète pas, ma chérie. Je m'occupe de tout avec Soulias. Et elle apprit que Cécile, ayant tué son mari, ne pouvait plus hériter de lui.
- Nous allons demander que la fortune de ton père te revienne entièrement. Pourtant il faudra attendre. Si Hermione pouvait encore s'en tirer, il faudrait bien partager avec elle, car juridiquement elle reste la fille de papa. Juliette venait de recevoir de Maître Soulias une gentille lettre dans laquelle il la remerciait d'avoir bien voulu régler ses honoraires. Antoine se chargeait de toutes ses formalités.
- Est-ce que j'ai un peu d'argent? demanda-t-elle.
- Ton père a laissé quelques comptes bloqués, des obligations, quelques actions, très peu de liquidités mais tu n'es pas démunie. Aussi, lorsque Cécile sera condamnée et que l'on saura tout sur le sort d'Hermione, ta situation va s'améliorer.
Hermione totalement démunie? Papa aurait-il voulu cela sachant pourtant qu'elle n'était pas sa fille?
- Arrange-toi pour lui laisser tout de même quelque chose, déclara-t-elle à Antoine. Je ne veux qu'une seule chose. Ne jamais la revoir. Et demande à Soulias s'il est possible qu'on ne me cite pas aux assises. Et Antoine promit. La vie continua.
Juliette voyait souvent la tante Janine.
Toutes deux reprirent même le train, direction la Bretagne. Tante Janine avait insisté pour y retourner. Elles s'installèrent dans leurs petites habitudes. Juliette allait à la plage, se baignait, nageait. Tante Janine se reposait sous le traditionnel pommier, lisait, préparait les repas. A quatre heures, elles prenaient leur thé. Il faisait doux, il faisait bon, Juliette somnolait.
Un jour, tante Janine qui avait disparu à l'intérieur de la maison, revint avec un paquet.
- Pour toi, ma chère enfant.
Juliette ouvrit le paquet. Pour y découvrir trois choses. D'abord la copie d'un testament ou du moins, d'un des paragraphes du testament. Oncle Paul lui léguait la jolie maison bretonne. Juliette bondit.
- Il n'en est pas question. Je ne veux pas t'en priver, tante Janine.
- Tu ne me prives de rien. Oncle Paul le voulait ainsi. D'ailleurs tout est réglé. Les droits de succession, les nouvelles inscriptions au cadastre, bref toutes les formalités ennuyeuses. En tous les cas Maître Lorang - encore lui - s'était chargé de tout.
Juliette était émue. Au fond de son coeur, elle adressa un grand merci à l'oncle Paul.
Mais il y avait autre chose dans le paquet.
Une jolie aquarelle représentant la maison bretonne avec son jardin. Le joli coup de crayon de l'oncle Paul. Et puis un portrait.
- Mais c'est Lisa, s'étonne Juliette.
Elle ne s'était même pas rendu compte que Lisa ne se trouvait plus dans son petit appartement. Brusquement, elle réapparut. Mais que faisait-elle avec tante Janine?
- Lorsque ta maman est morte et que nous avons rangé l'appartement, ton oncle a voulu "emprunter" ce portrait. Il avait quelquefois de drôles d'idées. J'ai laissé faire.
On réintégra la ville. Tante Janine vivait seule. Juliette s'occupait de son côté. Un jour, elle décida d'accrocher ou de raccrocher les deux tableaux. L'aquarelle ne posa aucun problème mais Lisa lui échappa des mains. Le verre qui la recouvrait se brisa. Zut. Cela n'était pas bien grave, il fallait acheter tout simplement un nouveau cadre. Juliette voulait avant tout se débarrasser du vieux cadre. Elle enleva les débris de verre puis tira sur le carton au dos du portrait. Tiens, il y avait un papier plié entre le carton et la photo. Elle le mit de côté car brusquement, elle avait compris qui était Lisa. Elle avait feuilleté récemment un ouvrage chez son libraire. D'abord, le portrait, ce n'était pas un original. C'était la reproduction d'une photo. Donc la signature ne pouvait être authentique. Elle sut que c'était Man Ray. Car Lisa était un top modèle des années d'avant-guerre. Elle posait pour les couturiers, les chapeliers - tous les chapeaux lui allaient - , bref la mode ne devait pas avoir de secrets pour elle. Dès le lendemain, Juliette voulait se procurer l'ouvrage qui s'intitulait - si ses souvenirs ne la trahissaient pas - tout simplement Lisa Fonssagrives.
Mais il y avait aussi ce papier plié. Une lettre. Signée oncle Paul.
- Ma chérie, avait écrit oncle Paul, j'ai toujours eu beaucoup, beaucoup de sympathie pour toi. Il faut que je te révèle une chose, je n'ai jamais eu le courage de te le dire, mais je suis sûr que Lisa te mènera à la vérité.
Quelle vérité? Quel était ce mystère? Avec quelque appréhension, Juliette poursuivit sa lecture.
- Vois-tu ma chérie, ton papa, ce n'était pas ton papa biologique, pas ton vrai père. Lui, il l'a toujours su. C'est d'ailleurs pour cette raison qu'il a rompu avec ta maman. Mais c'était un homme de coeur. Il avait beaucoup aimé ta maman, si belle, si frêle, tellement sans défense. Et il avait du s'attacher à toi. C'est pourquoi il n'a jamais voulu complètement rompre les liens avec sa première famille. Et il,n'a jamais rien dit à Cécile ou à Hermione. Adieu, ma chérie, je souhaite tout le bonheur possible pour ta vie future. Je t'aime beaucoup. Je t'embrasse. Ton oncle Paul.
Juliette relit la lettre, puis la rangea soigneusement dans un tiroir. C'était le jour des découvertes et des redécouvertes. Elle vit d'abord un joli petit paquet bleu qui renfermait toujours les boucles d'oreilles offertes par "papa". Elle décida de les porter. Elle retrouva aussi le bracelet. Du toc, peut-être? Mais si joli. En le regardant mieux, elle y vit gravé : Christian Dior. Donc, un bracelet d'une certaine valeur. Elle le mit à son bras. Et ce bout de papier c'était quoi? Elle y lut :
Empathie : Mode de connaissance intuitive d'autrui qui repose sur la capacité de se mettre à la place de l'autre.
Elle se souvenait. Tante Janine avait affirmé un jour, qu'elle se montrait très peu empathique. Elle avait jeté un coup d'oeil dans le dictionnaire. Dans le sien, l'adjectif n'y figurait pas, il n'y avait que le nom commun. Comme tante Janine avait raison. Durant toute son enfance et une grande partie de son adolescence, elle s'était révélée fort peu empathique, carrément idiote. Pour devenir mature, il lui restait une chose à faire. Le lendemain vit Juliette devant la tombe de "papa" Elle mit en terre, une rose.
- Merci pour tout, mon papa.
Elle comprit pourquoi papa avait rédigé ce drôle de testament.
- A celle qui se révélerait ma "vraie" fille. Hermione, Juliette...
Puis elle dut se rendre dans un autre cimetière. Là où reposait oncle Paul. Avec une baguette, découverte à proximité de la tombe, elle creusa un trou. Fin mais long. La lettre de l'oncle Paul déchirée en petits morceaux et enfouie au fond du trou. De l'eau par dessus. Combien de temps le papier mettrait-il a se biodégrader? Un peu de terre sur le tout. Puis, dans le sol meuble, elle planta aussi une rose. De la même variété de celle qu'elle avait laissé à "papa"
Elle eut un dernier regard pour la tombe de l'oncle Paul où resterait enfouie à jamais la lettre qui commençait ainsi :
- J'ai toujours eu beaucoup, beaucoup
de sympathie pour toi.
Début Chapitre 2 Chapitre 3 Chapitre 4 Chapitre 5