LIBERATION DE LIPSHEIM
25 Novembre 1944
J’avais 14 ans, le 20. J’ai reçu un ordre de réquisition pour aller creuser des tranchées dans les Vosges avec les « enfants » de ma classe.
Mon père m’a emmené à Strasbourg au bureau de recrutement chez le responsable nazi – En entrant chez le recruteur mon père lui a dit : « avec ce gamin vous voulez gagner la guerre ? » « Foutez moi le camps dit-il » avec quand même une exemption à la clef. J’étais vraiment un gamin malingre qui savait à peine tenir une pelle.
J’étais scolarisé à Strasbourg à la « Karlroos Schule », là on était obligé d’apprendre le latin et surtout l’anglais. Cette dernière langue m’a beaucoup aidé lorsque les américains sont venus à Lipsheim
L’école « Oberschule für Jungen » avait été bombardée par les américains. Le 25 septembre 1944, elle avait brûlé, ainsi qu’une partie de l’église St Jean. Nous n’avions heureusement pas classe ce jour là.
Dans la soirée du 21 novembre, vers 23 heures, on frappe à notre porte. Une section de soldats allemands nous a demandé d’ouvrir. Nous étions terrorisés mais les soldats nous demandèrent que du café et de quoi manger. Ils repartirent comme ils étaient venus. Ils étaient une vingtaine, très démoralisés.
Le matin du 25 novembre, nous entendîmes des bruits bizarres. Mon père nous emmène au chantier et de là nous virent une colonne de chars, de jeeps et de half-track venant de Geispolsheim.
L’émotion de la population était à son comble en entendant des soldats américains parler français. En réalité c’était des Français de la 2ème DB du Général Leclerc: les …… calots rouges !!
Le pont routier sur l’Andlau avait été miné et les Allemands l’avaient fait sauter. Le lendemain toute la division a passé sur la voie de chemin de fer et emprunté le pont ferroviaire qui n’avait sauté que partiellement. Nous donnions un coup de main pour égaliser le ballast pour permettre aux cars de passer sur les rails.
La 2ème D.B. partie en direction d’Erstein pour libérer cette ville.
Lors du passage sur les rails, le Général Leclerc était posté sur les marches du restaurant Woerth « Restaurant de la Gare » pour assister à cette délicate manœuvre.
Ma cousine Odile a remis un bouquet de fleurs à cette occasion, à l’équipage de la 1ère automitrailleuse. Le conducteur était le futur Abbé Marion.
Quelques jours après, la division Leclerc a du repartir et se sont les Américains qui les ont remplacés et c’est à ce moment là que l’anglais que les Allemands m’ont fait apprendre m’a servi à faire l’interprète auprès des autorités américaines (QG dans la maison de ma marraine).
Nous les jeunes, nous avons récupéré les armes et les munitions que les soldats Allemands ont dû jeter.
A 14 ans on savait tirer au fusil de guerre, dégoupiller des grenades et jouer avec les munitions.
Le Général de Lattre de Tassigny nous a fait visiter l’école des sous officiers qui se trouvait à Westhalten (Tir à balles réelles au-dessus des têtes…)
Benoît MEYER